Mentir sur son CV : une démarche risquée pour les candidats, mais aussi pour les recruteurs
CV mensonger : quels sont les risques ? Le curriculum vitae est essentiel dans le processus de recrutement. Il permet aux candidats de mettre en valeur leurs compétences, leurs diplômes et leurs expériences professionnelles. Il permet aussi aux recruteurs de sélectionner les profils les plus adaptés au poste à pourvoir. Mais que se passe-t-il lorsque le CV n’est pas conforme à la réalité , ou qu’un candidat ment sur son parcours, ses qualifications ou ses références ? Ainsi, quels sont les risques encourus ? Nous vous proposons de faire le point sur cette pratique qui peut avoir de lourdes conséquences pour les deux parties.
risques d’un CV mensonger pour le candidat
Mentir sur son CV est tentant pour certains candidats souhaitant se démarquer de la concurrence, ou combler des lacunes dans leur parcours. Mais cette stratégie est loin d’être sans risque. En effet, une obligation de loyauté et de bonne foi est imposée au futur salarié en cours de recrutement. (Article L1221-6 du code du travail.)
Le rejet de la candidature
Le premier danger évident pour le candidat déloyal, est de se faire démasquer par le recruteur. Celui-ci dispose en effet de plusieurs moyens pour vérifier la véracité des informations fournies, notamment :
- l’analyse du CV et de la lettre de motivation, à la recherche d’incohérences ou d’éléments suspects ;
- l’entretien d’embauche, qui permet de tester les compétences et les connaissances du postulant ;
- la prise de références, qui consiste à contacter les anciens employeurs ou les établissements scolaires du candidat.
Si le recruteur découvre que l’aspirant salarié a menti, il peut rejeter sa candidature sans autre forme de procès. Il est également possible que le recruteur se souvienne de celui qui a fait preuve de déloyauté à son encontre. En outre, il pourrait même officieusement partager cette information avec d’autres entreprises ou cabinets de recrutement, ce qui peut assombrir l’avenir de l’impétrant indélicat.
L’annulation ou le licenciement
Le second écueil, plus grave, pour le candidat qui ment et qui parviendrait à être embauché, est de voir le contrat annulé en justice ou de faire l’objet d’un licenciement. En effet, on peut distinguer plusieurs situations.
- S’il est avéré que le mensonge a été un élément déterminant dans la décision d’embauche, un dol est caractérisé au sens de l’article 1137 du Code civil. L’employeur peut alors demander en justice l’annulation du contrat de travail.
- Par ailleurs, un manquement à l’obligation de loyauté du salarié en cours de contrat (article 1222-1 du Code du travail) peut être soulevé à l’appui d’une procédure de licenciement. Par contre, ce motif de licenciement doit nécessairement être mis en œuvre dans un délai raisonnable après l’embauche litigieuse. La faute grave privative de l’indemnité de licenciement et de préavis peut alors être justifiée. On trouvera une application de ce motif de licenciement dans cet arrêt de la Cour de cassation.
- Si l’employeur n’a pas fait les vérifications d’usage, avait connaissance des mensonges du candidat, ou a laissé passer un délai important après l’embauche, il ne lui est plus possible de justifier d’un dol ou d’une déloyauté. Une illustration en est donnée dans cet arrêt. Dès lors, pour pouvoir licencier, il doit prouver que le salarié n’a pas les compétences professionnelles nécessaires pour exercer le poste. Il s’agira alors d’un licenciement pour insuffisance professionnelle.
Bon à savoir : le dol est constitué par des manœuvres pratiquées par l’une des parties qui sont telles qu’il est évident que sans elles, l’autre partie n’aurait pas contracté.
Les risques d’un CV mensonger pour le recruteur
Le CV mensonger n’est pas seulement préjudiciable pour le futur salarié, il l’est aussi pour le recruteur.
Le manque de performance
Le premier risque évident est de se retrouver avec un salarié qui n’a pas les compétences requises pour le poste. Cela peut entraîner une baisse de la qualité du travail, une insatisfaction des clients ou des partenaires, voire des erreurs ou des accidents. Par ailleurs, ces situations ont un coût financier et humain pour l’entreprise, qui peut perdre du temps, de l’argent et de la crédibilité.
L’aléa juridique
De plus, si le salarié exerce une profession réglementée sans avoir le diplôme ou l’autorisation nécessaire, il peut engager la responsabilité civile ou pénale de l’employeur.
Par exemple, si un salarié se fait passer pour un médecin et commet une faute, l’employeur peut être poursuivi pour mise en danger de la vie d’autrui ou homicide involontaire. Il peut également être sanctionné pour complicité d’exercice illégal de la médecine.
L’aléa réputationnel
Si la falsification du salarié est révélée au grand jour, elle peut entacher la réputation de l’entreprise qui peut perdre la confiance et la fidélité de ses interlocuteurs. Elle peut également avoir par la suite des difficultés à attirer ou à fidéliser des talents, qui peuvent craindre pour leur avenir professionnel au sein d’une entreprise de mauvaise réputation.
Quelques conseils et bonnes pratiques
Face aux aléas que nous avons rappelés, il est essentiel pour les deux parties d’un recrutement d’adopter de bonnes pratiques. Aussi, voici quelques conseils à suivre.
Pour les candidats :
- Soyez honnête et transparent sur votre parcours et vos compétences. Ne mentez pas sur vos diplômes, vos expériences professionnelles ou vos références.
- Il vous est toutefois possible et conseillé de mettre en valeur vos atouts et de justifier avec honnêteté et humilité vos points faibles. Cette attitude améliore votre crédibilité auprès des recruteurs.
- N’oubliez pas qu’un recrutement réalisé sur des bases fausses vous sera autant préjudiciable qu’à votre employeur.
- Faites relire votre CV par un tiers. Demandez l’avis d’un tiers de confiance, qui connaît bien votre secteur d’activité. Il pourra vous aider à corriger les fautes, à clarifier les points obscurs ou à valoriser vos points forts afin d’obtenir un CV percutant.
Pour les recruteurs
- Analysez le CV avec attention. Aussi, repérez les éventuelles incohérences, les zones d’ombre, les informations floues ou imprécises.
- Testez les compétences du candidat. En effet, lors de l’entretien d’embauche, posez lui des questions précises et techniques sur le parcours et les compétences. Par ailleurs, faites lui passer des tests ou des mises en situation pour évaluer son niveau réel.
- Contrôlez les références. En effet, contactez les anciens employeurs ou les établissements scolaires du candidat pour vérifier la véracité de ses diplômes et de ses expériences professionnelles. En complément, vous trouverez plus de détails sur cette pratique dans cet article.
- Faites appel à des prestataires externes qualifiés pour vérifier les diplômes ou les qualifications.
À retenir
- Le CV mensonger est une pratique qui peut avoir de graves conséquences pour les candidats et les recruteurs.
- Mentir sur son CV expose à un rejet de sa candidature, à une annulation du contrat, à un licenciement pour faute grave, voire à des sanctions pénales pour une profession réglementée.
- Le recruteur qui embauche un candidat déloyal s’expose à un manque de performance, à un aléa juridique ou réputationnel.
- Pour éviter les CV mensongers, il est essentiel pour les candidats d’être honnêtes et transparents, et pour les recruteurs d’être vigilants et rigoureux.
Mentir sur son CV est donc une pratique dangereuse quel que soit le point de vue adopté. Par conséquent, un recrutement professionnel permet d’éviter ce genre de problèmes. N’hésitez pas à nous contacter à ce sujet.
Sources :
- Légifrance. Code du travail : article L1221-1.
- Légifrance. Code du travail : articles L1221-6 à L 1221-9.
- Légifrance. Code du travail : article L1222-1.
- Légifrance. Code civil : article 1134.
- Légifrance. Code civil : article 1137.
- Légifrance. Code pénal : article L433-17.
- Légifrance. Code pénal : article 441-1 et suivants.
- Légifrance. Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 novembre 2015, 14-21.521.
- Légifrance. Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 9 juin 2017, 16-15.244, Inédit.
L’auteur de cet article : « CV mensonger : quels sont les risques ? »
Christoph Marchal
Juriste en droit social et spécialiste des ressources humaines